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de la reine, sont parvenus à m’enlever un trône où j’avais compté de faire monter ma nièce. Mais ces sujets ingrats ne tarderont pas à éprouver ma juste colère ; et, pour commencer par ceux qui sont les principales causes de ma disgrâce, prends dans mes écuries un de mes plus forts griffons, vole dans l’île Bambine, saisis-toi des frères et sœurs de Cadichon, et amène-les dans cette île ; je me charge d’enlever Pétaud et Gillette, et, lorsque je les aurai tous rassemblés, je changerai ceux-ci en lapins, et leurs enfants en bassets. Si un reste de pitié que je ressens encore pour Cadichon vient à m’abandonner, je ne réponds pas qu’il n’éprouve aussi les effets de ma vengeance. Allons cependant tout préparer pour l’exécution de mes desseins, et pensons, ma chère Barbarec, qu’ayant quitté les lois des périses pour suivre celles des dives, nous sommes devenues les ennemies des fées, des hommes, et que nous ne devons rien négliger pour les accabler du poids de notre haine. »

La Fée des champs ne put entendre ce discours sans frémir ; elle demeura quelque temps immobile ; puis, rappelant sa raison, et sentant de quelle conséquence il était de ne pas rester plus longtemps dans ce séjour terrible, elle prit le parti d’en sortir et d’aller au plus tôt implorer la puissance de la reine des fées. Elle repassa de l’autre côté de l’île ; mais elle était à peine descendue à terre, que le ciel s’obscurcit, la terre trembla, et des mugissements épouvantables, en s’unissant au tonnerre et aux éclairs, semblaient annoncer la destruction prochaine de l’univers. Quelques moments après, le calme revint dans les airs ; mais le jour, s’obscurcissant de plus en plus, fit place à un nouveau spectacle aussi terrible que le précédent.