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ordonne, de la part des destinées, de nommer votre époux. »

Luisante regarda le beau perroquet, Tarare et Fleur d’Épine deux ou trois fois l’un après l’autre ; et, après quelques moments de rêverie : « Qu’il choisisse lui-même, dit-elle, entre Fleur d’Épine et Luisante. »

Tarare tressaillit à ces paroles ; et, comme s’il fût sorti de quelque songe, s’adressant à elle : « Belle Luisante, lui dit-il, je ne suis pas digne d’une gloire où je n’aspire plus, et à laquelle je n’ai seulement pas songé depuis la première vue de l’infortunée Fleur d’Épine. Elle n’est plus, et mon cœur me reproche tous les moments que je survis à cette perte : je ne vivais que pour elle, et le seul choix qui me reste est de la suivre… — Et si elle vivait ?… » dit Serène. Ces trois mots le firent un peu revenir à lui ; quelque ombre d’espérance s’insinua dans son cœur : il connaissait le pouvoir de Serène ; et, se jetant à ses pieds : « Si elle vivait ! s’écria-t’il. Qu’elle vive ! et, s’il ne faut que ma vie pour racheter la sienne, que Tarare meure, et que la belle Fleur d’Épine revoie la lumière du jour ! »

Quelque esprit qu’on ait, il est cent rencontres où l’on ne sait ce qu’on fait, quand on aime passionnément ; mais il est de la bienséance d’avoir la raison égarée dans un sujet d’affliction pareil à celui qu’il croyait avoir. Il était donc si sot dans cette occasion, qu’il serait resté jusqu’à la fin du monde aux pieds de Serène, attendant la résurrection de sa maîtresse, sans deviner qu’elle n’était pas morte.

La tendre Fleur d’Épine, qui ne perdait pas la moindre parole de cette conversation, était sur son lit de repos, qui s’évanouissait presque de reconnaissance et de joie.

Serène crut qu’il était temps de donner quelque soulage-