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tenir ; elle était persuadée que tout ce qu’il y a de plus funeste était arrivé au roi.

La reine et Truitonne triomphaient ; la vengeance leur faisait plus de plaisir que l’offense ne leur avait fait de peine. Et, au fond, de quelle offense s’agissait-il ? Le roi Charmant n’avait pas voulu épouser un petit monstre qu’il avait mille sujets de haïr. Cependant le père de Florine, qui devenait vieux, tomba malade et mourut. La fortune de la méchante reine et de sa fille changea de face : elles étaient regardées comme des favorites qui avaient abusé de leur faveur ; le peuple mutiné courut au palais demander la princesse Florine, la reconnaissant pour souveraine. La reine, irritée, voulut traiter l’affaire avec hauteur ; elle parut sur un balcon et menaça les mutins. En même temps la sédition devint générale, on enfonce les portes de son appartement, on le pille et on l’assomme à coups de pierres. Truitonne s’enfuit chez sa marraine la fée Soussio : elle ne courait pas moins de danger que sa mère.

Les grands du royaume s’assemblèrent promptement, et montèrent à la tour, où la princesse était fort malade : elle ignorait la mort de son père et le supplice de son ennemie. Quand elle entendit tant de bruit, elle ne douta pas qu’on ne vînt la prendre pour la faire mourir. Elle n’en fut point effrayée : la vie lui était odieuse depuis qu’elle avait perdu l’oiseau bleu. Mais ses sujets, s’étant jetés à ses pieds, lui apprirent le changement qui venait d’arriver à sa fortune ; elle n’en fut point émue. Ils la portèrent dans son palais et la couronnèrent.

Les soins infinis que l’on prît de sa santé et l’envie qu’elle avait d’aller chercher l’oiseau bleu contribuèrent beaucoup