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Aussitôt l’oiseau vint, et la nuit se passa comme l’autre, sans bruit et sans éclat, dont nos amants étaient ravis ; ils se flattaient que la surveillante prendrait tant de plaisir à dormir qu’elle en ferait autant toutes les nuits. Effectivement la troisième se passa encore très heureusement ; mais, pour celle qui suivit, la dormeuse ayant entendu quelque bruit, elle écouta sans faire semblant de rien ; puis elle regarda de son mieux, et vit au clair de la lune le plus bel oiseau de l’univers qui parlait à la princesse, qui la caressait avec sa patte, qui la becquetait doucement ; enfin elle entendit plusieurs choses de leur conversation, et demeura très étonnée, car l’oiseau parlait comme un amant, et la belle Florine lui répondait avec tendresse.

Le jour parut, ils se dirent adieu, et, comme s’ils eussent eu un pressentiment de leur prochaine disgrâce, ils se quittèrent avec une peine extrême. La princesse se jeta sur son lit toute baignée de ses larmes, et le roi retourna dans le creux de son arbre. Sa geôlière courut chez la reine, elle lui apprit tout ce qu’elle avait vu et entendu. La reine envoya quérir Truitonne et ses confidentes ; elles raisonnèrent longtemps ensemble, et conclurent que l’oiseau bleu était le roi Charmant. « Quel affront ! s’écria la reine. Quel affront, ma Truitonne ! Cette insolente princesse, que je croyais si affligée, jouissait en repos des agréables conversations de notre ingrat ! Ah ! je me vengerai d’une manière si sanglante qu’il en sera parlé. » Truitonne la pria de n’y perdre pas un moment, et, comme elle se croyait plus intéressée dans l’affaire que la reine, elle mourait de joie lorsqu’elle pensait à tout ce qu’on ferait pour désoler l’amant et la maîtresse.

La reine renvoya l’espionne dans la tour ; elle lui ordonna