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nière qui le vengerait des tours qu’elle lui avait faits. Ensuite ce perfide prince montra barbarement à Finette un tonneau tout hérissé par dedans de canifs, de rasoirs et de clous à crochet, et lui dit que, pour la punir comme elle le méritait, on allait la jeter dans ce tonneau, puis le rouler du haut de la montagne en bas.

Quoique Finette ne fût pas Romaine, elle ne fut pas plus effrayée du supplice qu’on lui préparait que Régulus ne l’avait été autrefois à la vue d’un destin pareil. Cette jeune princesse conserva toute sa fermeté, et même toute sa présence d’esprit. Riche-Cautèle, au lieu d’admirer son caractère héroïque, en prit une nouvelle rage contre elle, et songea à hâter sa mort. Dans cette vue, il se baissa vers l’entrée du tonneau qui devait être l’instrument de sa vengeance, pour examiner s’il était bien fourni de toutes ses armes meurtrières. Finette, qui vit son persécuteur attentif à regarder, ne perdit point de temps ; elle le jeta habilement dans le tonneau, et elle le fit rouler du haut de la montagne en bas, sans donner au prince le temps de se reconnaître. Après ce coup, elle prit la fuite ; et les officiers du prince, qui avaient vu avec une extrême douleur la manière cruelle dont leur maître voulait traiter cette aimable princesse, n’eurent garde de courir après elle pour l’arrêter. D’ailleurs, ils étaient si effrayés de ce qui venait d’arriver à Riche-Cautèle, qu’ils ne purent songer à autre chose qu’à tâcher d’arrêter le tonneau, qui roulait avec violence ; mais leurs soins furent inutiles : il roula jusqu’au bas de la montagne, et ils en tirèrent leur prince couvert de mille plaies.

L’accident de Riche-Cautèle mit au désespoir le roi Moult-Bénin et le prince Bel-à-Voir. Pour les peuples de leurs