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L’EMPLOYÉ.

Il fonctionne du côté de la Russie, mais le fil est coupé du côté d’Irkoutsk.

JOLLIVET.

Ainsi les dépêches passent encore ?

L’EMPLOYÉ.

Entre Kolyvan et Moscou, oui.

JOLLIVET.

Pour le gouvernement ?…

L’EMPLOYÉ.

Pour le gouvernement, s’il en a besoin,… pour le public, lorsqu’il paye ! C’est dix kopeks par mot.

JOLLIVET.

Et que savez-vous ?

L’EMPLOYÉ.

Rien.

JOLLIVET.

Mais les dépêches que vous…

L’EMPLOYÉ.

Je transmets les dépêches, mais je ne les lis jamais.

JOLLIVET, à part.

Un bon type ! (Haut.) Mon ami, je désire envoyer à ma cousine Madeleine une dépêche relatant toutes les péripéties de la bataille.

L’EMPLOYÉ.

C’est facile… Dix kopeks par mot.

JOLLIVET.

Oui… je sais… mais une fois ma dépêche commencée, pouvez-vous me garder ma place pendant que j’irai aux nouvelles ?

L’EMPLOYÉ.

Tant que vous êtes au guichet, la place vous appartient… à dix kopeks par mot ; mais si vous quittez la place, elle appartient à celui qui la prend… à dix…

JOLLIVET.

À dix kopeks par mot !… oui… c’est entendu !… Je suis seul !… commençons, (Il écrit sur une tablette du guichet.) « Mademoiselle Madeleine, faubourg Monlmartre, Paris. — De Kolyvan, Sibérie… »

L’EMPLOYÉ.

Ça fait déjà quatre-vingts kopeks !