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GLENARVAN.

Mais ce terrible animal, ayant avalé la bouteille dans ces mers lointaines, et étant venu se faire prendre à bord du Duncan, nous avons eu ainsi des nouvelles des malheureux naufragés.

ARABELLE.

Mais comment imaginer qu’une bouteille puisse se trouver dans l’estomac d’un… poisson ?

GLENARVAN.

Les matelots ne sont généralement pas animés de bienveillantes intentions à l’égard des formidables squales en question. Lorsqu’on en prend un, il est d’usage, à bord des navires, de visiter soigneusement son estomac : on l’ouvre à coups de hache, et c’est ainsi que l’on a trouvé cette bouteille solidement engagée dans les viscères de celui que nous avions pris.

ARABELLE.

Quel effrayant récit !… Passez-moi mon flacon, mon mouchoir et mon éventail, capitaine Wilson.

WILSON.

Voilà, milady.

ARABELLE, respirant le flacon.

Continuez, mon neveu.

GLENARVAN.

Je disais donc que la bouteille, une fois retirée, on l’examina. Les pétrifications qui la recouvraient, ces substances minéralisées sous l’action des eaux, prouvaient qu’elle avait fait un long séjour dans l’Océan !… N’est-il pas vrai, Mulray ?

MULRAY.

Dix ou douze mois environ, Votre Seigneurie, avant d’aller s’engloutir dans le ventre du req…

ARABELLE, effrayée.

Mulray !…

MULRAY.

Dans le ventre du… du hareng… si mademoiselle préfère ce nom à l’autre !

ARABELLE.

Ça ne rend peut-être pas très exactement la pensée, mais c’est moins terrifiant… Je préfère.