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XL.



O Dieux puisque sa face angeliquement belle,
Par un triste despart se retire de moy :
Puis-je pas detester la trop severe Loy,
Qui luy charge le col d'une chaisne cruelle ?

Dieux que n'est-il permis par quelque loy nouvelle,
Qu'on puisse avec l'Amour desengager sa foy :
Et ce que lon desire enchaisner avec soy,
Formant de deux desirs une amour mutuelle.

On peut creer un corps de deux extremitez,
Mais la haine & l'amour ont leurs poincts limitez :
Et l'Amour en l'Amour gist la seule armonie.

La Foy naist de la Foy, & l'Amour de l'Amour,
Ainsi perdant son œil, je pers aussi le jour :
Car s'il est feu d'Amour, il est feu de ma vie.


XLI.


Affin qu'à l'advenir on t'adore, ô Deesse,
Je plante en ton honneur ce Laurier immortel :
Je te sacre ce temple, ou j'offre à ton autel,
Les armes dont Amour a dompté ma jeunesse.

Ceux qui t'invoqueront pour vierge chasseresse,
Et qui t'honoreront de maint vœu sollennel,
Ne puissent du trespas sentir le dart cruel,
Ainsi le trait bien-heureux dont ta beauté me blesse.

Fait nouvel Acteon je veux hanter ces bois,
Serf de ta déité : mais non privé de voix,
De memoire, de sens, ou de veuë, ou d'oreilles.

Mais bien veux-je à jamais t'appandre mille vœus,
Chanter ta chasteté, & servir aux nepveus,
De glace pour mirer tes divines merveilles.