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XXX.


Du Soleil radieux, la brillante splendeur,
Et de la Lune aussi la lumineuse face,
Par un nuage espais, espars en l’air, s’efface :
Lors qu’ils vont tournoyant la celeste rondeur.

L’hyver ravit aux fleurs la couleur & l’odeur,
Et en moins d’une nuict les flestrit & terrace :
Le fruict trop avancé se passe en peu d’espace,
Et bref tout est fauché par le temps moissonneur.

Telie, voy ces lys, ces œilets & ces roses,
Languir à chef baissé desquelles sont descloses :
Qui t’esmeuvent d’avoir de toy-mesme pitié.

Cueillons donques les fleurs de ta verde jeunesse,
Et folle n’atten pas que la blanche vieillesse,
Te prive de sentir les fruicts d’une amitié.


XXXI.


Quand l'or de tes cheveux qui ton beau front redore,
En la belle saison de ton plus guay printemps :
Et quant le cours aellé de tes ans fleurissans,
Feront place au destin qui tout ronge & devore :

Quand ce beau teint rosin qui ta face colore,
Et quand les rais persans de tes Astres luisans,
Perdront lustre,& vigueur : mille soupirs cuisans,
Te sortiront du flanc, & te poindront encore.

Mais il sera trop tard de maudire le jour,
Que tu n'auras daigné cueillir les fruicts d'amour :
Car ceux qui de t'aimer ont ore quelque envie,

Se voyans repoussez par un maigre refus,
S'eslongneront de toy : & lors tes sens confus,
Te feront detester le reste de ta vie.