Page:Les oeuvres poétiques de Clovis Hesteau de Nuysement 1578.pdf/101

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

XXVI.


Les Dieux ne devoient pas d'une si pure essence,
Former tes chastes mœurs : & mon astre cruel,
Ne devoit point aussi rendre perpetuel,
L'implacable destin qui suivit ma naissance.

Que sert aux deitez (qui ont toute puissance,)
D'allumer dans mon cueur un desir eternel,
De suivre en me flattant le mal-heur perennel,
Qui a tousjours guidé les pas de mon enfance.

Helas n'avois-je assez de ce grand Jupiter,
En la crainte, & l'amour? sans encore t'irriter,
Plus cruelle envers moy qu'une quarte Eumenide?

Blasme donque mon astre & tes perfections,
Qui pour estre le but de mes affections,
Te font injustement estre mon homicide.


XXVII.


Ce ne fut des le jour que j'eu veu tes beaux yeux
Qu'une si saincte ardeur se glissa dans mes veines :
Car de mille beautez les algarades vaines,
N'avoien sceu encanter mes esprits otieux.

Mais helas aussi tost (ô merveille des Cieux),
Que j'ouy tes discours, j'ouy chanter mes peines :
Et comme ta parole eut des aelles soudaines,
Aussi soudainement je devins soucieux.

J'honore tes beautez, je prise tes richesses :
Mais ce qui te peut rendre au nombre des deesses,
A saisi le sommet de mes affections.

Si je peins mieux ton corps que tes graces infuses,
N'accuses mon vouloir, ny l'amour, ny les Muses :
Moindres sont les beautez que les perfections.