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QUARANTE-SEPTIÈME AVENTURE.

tour de lui, s’acharnent après sa croupe et ses flancs, jusqu’au moment où les chasseurs arrivent. Le porc alors rassemble ses forces, passe à l’autre rive et fuit à travers champs ; les chiens, les chasseurs le rejoignent et le dépassent : il est forcé de s’arrêter. Un levrier plus ardent que les autres est atteint de sa terrible dent, et jeté dans l’air il retombe sans vie, pendant que la bête, gravement blessée, parvient encore à mettre un espace entre les chiens et elle. Mais toute issue lui est interdite ; le sanglier revient à l’eau, la meute entière l’y joint encore, mais reste à quelque distance, et c’est avec cette furieuse escorte qu’il rentre une seconde fois dans la forêt. Un quatrième levrier, qui l’avoit osé prendre à la gorge, est encore saisi, lancé contre un hêtre, la tête brisée, le ventre ouvert. Alors le Chevalier prend l’avance d’une portée d’arbalête. Ferme dans l’étrier, l’épieu au poing, il attend le sanglier que les blessures et la rage aveugloient, et qui vient se jeter à corps perdu sur lui. Le bois de l’epieu se brise, mais le fer reste dans le corps et penêtre comme un razoir du bas de l’épaule aux intestins. Aussitôt le monstre chancèle et cesse de se défendre en cessant de vivre. Le Chevalier met pied à terre, et tous les chasseurs arrivés autour de lui rendent grâces à Dieu de la victoire.