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TRENTE-HUITIÈME AVENTURE.

aimiez Ysengrin après cela, et si vous pouviez souffrir qu’il vous donnât le nom de sœur ou d’épouse ! »

Ces paroles firent monter le rouge au visage de Madame Hersent ; tout son corps frémit et la sueur parut inonder son front. Enfin jetant un grand soupir : « Sire Grimbert, » dit-elle, « vous avez raison ; j’aurois mille fois mieux aimé que Monseigneur et Renart demeurassent, bons amis. Il est certain que jamais Renart n’eut de moi la moindre faveur, et je suis, pour le prouver, prête à subir l’épreuve du fer chaud ou de l’eau froide. Mais hélas ! de quel poids sera ma declaration ? On n’ajoute pas foi à ce que peut dire une pauvre malheureuse. Oui, j’atteste tous les saints qu’on adore et Dieu mon sauveur lui-même, que Renart ne me traita jamais autrement que si j’eusse été sa mère. Non que je le dise pour Renart ou pour le profit de sa cause ; je ne me soucie pas de lui et de ceux qui l’aiment ou le haïssent plus que du chardon dont les ânes se régalent ; mais je le dis pour Monseigneur Ysengrin, dont la jalousie ne me laisse pas de relâche, et qui s’imagine toujours qu’on l’a trompé. Par la foi que je dois à mon fils Pinçart, il y aura dix ans au premier avril, le propre jour de Pâques, que l’on nous maria Ysengrin et moi. Les noces