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L’INSTRUCTION DU PROCÈS.

fin, il ne viendra dans l’esprit de personne qu’Ysengrin eût levé cette clameur, si l’offense n’étoit pas aussi claire que le jour ; et quelle ne seroit pas sa honte, si, maintenant, on lui dénioit justice ?

— Ma foi ! » répondit en ricanant Cointereau, « il est singulier qu’on mette une sorte de point d’honneur à faire éclater aux yeux de tous sa propre honte. Eh, mon Dieu ! si Renart a fait ce qu’on lui reproche, à tout pécheur miséricorde, et notre devoir est d’accommoder les parties. Croyez-moi, d’ailleurs, le Loup n’est pas si grand qu’on le pense, et Renart ne le craint guères : il sait que petite pluie a souvent abattu grand vent. Il viendra, j’en ai la conviction. Quant à messire Brun, en parlant aussi longuement, il a véritablement perdu belle occasion de se taire.»

Damp Brichemer étoit de trop grand sens pour continuer ces querelleuses railleries. Résumant donc nettement le débat : « Seigneurs, » dit-il, « nous ne devons penser qu’à prendre jour pour accorder les parties. Renart a proposé de faire serment ; sommons-le de tenir cet engagement. Aussi bien, comme Baucent l’a sagement remarqué, ne peut-on tenir plaid, à propos de meurtre ou de mortel outrage, tant que la question de fait n’est pas mise hors de doute. Et jus-