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II


Le lendemain, l’émeute vaincue, les chefs emprisonnés, les journaux supprimés, Mme  de Pahauën arrêtée, était conduite sous bonne escorte au delà des lignes françaises.

Le général demeurait triste. Il accueillit sans satisfaction l’officier d’ordonnance qui vint lui annoncer l’exécution de ses ordres. Et malgré lui, à travers les routes défoncées, les villages occupés, le navrant paysage de ruine que l’invasion mettait autour de Paris, son esprit suivait obstinément l’élégante femme aux cheveux roux, dont la possession l’avait tant charmé. Maintenant, la colère passée, son départ le peinait. Il considérait que, volontairement, il avait amoindri son prestige et diminué sa toute-puissance. Quelque chose lui manquait qui gâtait son succès.

Jadis, mis à l’écart par les soupçons de l’Empire, boudeur, dans sa retraite irritée d’écrivain et de soldat, il avait fiellé des articles nombreux contre les turpitudes et les hontes du règne, mais cependant jamais il n’avait pu se défendre d’un moment d’émotion et d’une minute d’envie, quand les journaux