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I.AiME MECONNUE. 545

linninic a donne la clef de son jielil apiiaitenicnt ii la femme qni sVst présentée le malin. Ce n’est pas que ce soit un homme de ma’Uis très-rigides ; mais l’âme méconnue a si bien l’air d’une tante , qu’il croit faire acte de père de famille en introduisant près de son jeune locataire une personne raisonnahli’ qui le tancera ; car il commence ’a se dérangcM- un peu.

Surpris au lit, le malheureux fait presque toujours tourner l’explication h son désavanlase ; il a été éijaré par de faux amis , et il relomhe dans l’ahime auquel il avait voulu s’arracher. C’est alors que la vie devient un alfreuv supplice : ce sont des lettres tous les matins , des rendez-vous tous les soiis ; il ne répond pas , il y manque ; il va dîner paiement au café Donix près d’une fenêtre ; il rit , il parle , il boit. Tout a coup sa gaieté se ternil , son visa ;;e devient sombre ; c’est que l’âme méconnue vient de lui apparaître au fond d’une citadine "a un cheval : elle est folle . exaspérée, elle peut monter, faire une scène et le perdre ; oui, le perdre, car elle le rendra ridicule. Alors il prend un prétexte poursortir , il descend , et pour se débarrasser de celte funeste apparition . il promet tout ce qu’on veut. Il remonte , mais il n’a plus d’appétit ; son dîner tourne, il a une indigestion ; et quand il rentre chez lui où on l’attend , il faut qu’il remercie encore l’âme méconnue du thé qu’elle lui donne : horreur !

Kn être réduit à avoir une indigestion devant une femme. 11 y a de quoi l’étrangler. 

Mais vouloir écrire tous les accidents d’une paieille histoire, ce serait entreprendre un livre de dix volumes : cl les menaces de suicide, et l’honneur perdu pour lui seul, et les suppositions de grossesse impossible , et toute la fantasmagorie des sentiments faux , exagérés. Cela peut durer six mois , au bout desquels le malheureux déménage ou part pour les îles. Ce sont les âmes méconnues qui lèguent aux autres femmes ces cœurs d’hommes secs et impitoyables qui ne croient "a rien , qui brutalisent les sentiments les pins délicats , ricanent des alfeclions les plus tendres , et qui ont créé cette phrase : Elle est morte d’amour et d’une fluxion de poitrine. Queliiue ignoble que soit l’âme méconnue ii l’état de fille, quelque féroce qu’elle soit ’a l’état de veuve , ce n’est rien encore auprès de ce qu’elle estii l’étal de femme. Elle parvient à cet état par des voies bien différentes : quelquefois elle y apporte les germes decette espèce d’affection cérébralechronique qui constituent l’âme méconnue ; c’est alors quelque sous-maîlresse de pension qui épouse un marchand de vin veuf, et qui veut donner une seconde mère "a ses filles. Le gros gaillard continue à boire, "a manger , "a rire fort , tandis que la femme se renferme dans le dédaigneux silence de la supériorité , mangeant du bout des lèvres , parlant de même , rendant de même a son époux ses caresses et ses bons baisers d’affection. 11 jonc le piquet , tandis quelle lit Lamartine , et il ronlle dans son lit , tandis qu’elle rêve éveillée "a coté de lui. Il est inutile de dire où doit aboutir une pareille union. D’autres fois l’âme méconnue est entrée en ménage avec toute l’envie sincère d’être une bonne femme ; alors , il peut arriver que l’affection la gagne par les livres ou par le contact avec une personne gangrenée. Dans ces cas-là , comme nous l’avons dit plus haut , le développement de l’âme méconnue est énorme ; car c’est tout son passé sacrifié et perdu dont il faut qu’elle se venge , cl le mari doit , en souffrances qu’elle lui inflige , toutes les joies ineffables d’un amour céleste qu’il ne lui a pas procurées. L’employé