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(.lél)Uts (le p ;ii’lies qui remonlenl. île I’hikI i’ii CDinlile, récouoiiiie classique de l’an cien jeu : chaque pièce a son gamb’ti qui porte son nom ; de sorte que Palamède, l’amerlaii , Alexandre de Macédoine, l’arniénion , Sésosiris , Confiicius, Mahomet, Sélim II, Lusiftnan, (Iharleinafine, Penaud de Montanban, Lancelol, François I". Charles-Quinl. tous ces grands honuiies qui avaient de si lianles prélentions à la science de l’échiquier, lomheraient niorls de surprise aujourd’inil s’ils ressuscitaient seulement devant le gnmbiuUi capitaine lîvans. Il est vraiment bien singulier que Palamède, qui a joué aux échecs dix ans consécutifs devant les murailles de Troie, avec Agaraemnon, Achille, DIomède, les deux Ajax, lous jeunes gens pleins de verve et d’imagination, n’ait pas deviné le moindre (fambïl. Ce fut Paris, berger sur le mont Ida, qui inventa le coup du hcrcjci ; et Sinon, qui donna l’échec du cheval de bois au roiPriam, n’a pu créer le f/(i)»/’(/ du cavalier. Pourtant, quelles occasions ils avaient tous alors, pour mettre le noble jeu en progrès ! Achille ne bougeait pas (le sa tente, et jouait aux échecs avec Palrocle nuit et jour. Aganieninon, qui se batlait peu, jouait avec le vieux Nestor. Ménélas, le Iront courbé et appesanti par ses infortunes conjugales, jouait avec Ulysse, l’inventeur. Sur mille vaisseaux à l’ancre à l’eud)ouchure du Simoïs, il y avait deux mille capitaines grecs (|ui cultivaient l’échiquier. On se battait une fois par trimestre, on se gardait bien de prendre Troie, et le lendemain les parties recouiuteiiçaient sur les hautes poupes, celûs }ni]ij)ibus , ou sur le sable de la mer. C’était un immense club d’échecs qui avait pour limites le Scaniandre, les portes Scées, le cap Sigée et Ténédos. On conçoit que les nombreux chefs et rois qui bio(|uaient Ilium, et qui périssaient d’ennui, aient appelé à leur secours un jeu inventé ou du moins perf(îctionné par leur camarade Palamède, et que, maîtrisés par l’inépuisable attrait des condiinaisons, lisaient laissé couler 1( s heures brûlantes du jour "a rond)re sous un sapin de l’Ida, sous une tente, dans un entrepont, et devant un échiquier. La lon ;;ueur de ce siège qui déconcertait Voltaire et le Vénitien Pococurante, s’explique ainsi naturellement. Avec la donnée que nous hasardons ici, on conçoit très-bien cette longue retraite de sept ou huit ans qu’Achille s’imposa sous sa tente, et qui, sans la puissante diversion des échecs, eût été impossible avec un caractère de Jeune héros fort enclin aux vives locomotions de la jjuerre. Suppiimez la tradilion homérique des échecs, et vous ne vous rendrez pas compte de la condiiile du lils de Tliélis, anachorète sous un morceau de toile de six pieds carrés. Pareil raisonnement s’applique aux lenteurs jus- (ju’alors énigmatiquesdu siège. Tous ces rois joueurs et passionnés oubliaient Ilium, et les désa^jréments de Ménélas : il fallait que l’infortuné mari d’Hélène leur peignit souvent et avec vivacité tout le tort qui résultait contre lui de ce long siège qui laissait vieillir sa femme enlevée, pour arracher les rois fainéants de l’armée aux douceurs de l’ec/icc e/ mal. Ménélas voyait au bout de dix ans Ilium en ruines et sa femmeaussi. Le noble jeu avait donc fait le mal, et il le guérit ; ce fut donc l’échi (|ujer qui fut la véritable lance d’Achille. Vous allez voir. Conseillé par Ménélas. le constiucteur Épeus, (ubr’walor Epens, tailla une pièce d’échecs, grande comme une niiiiila^ne . iiisliir nioiilix ; Sinon la lit manieuvrei par des détours obliques, comme un cheval du jeu, cl il ninla le loi l’riain ; maclut ml nias, selon lexpression