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tés et les injustices, amenant avec lui la justice et la piété; et tout cela il le faisait nu et seul. Quand Ulysse fut jeté à la côte par un naufrage, se laissat-il abattre par son dénuement? Perdit-il courage? Non: voyez comme il va demander à des vierges ces vêtements indispensables, que nous trouvons si honteux de demander à un autre.

« Il allait comme un lion nourri dans les montagnes et qui se confie en sa force. »

Qu’est-ce qui faisait donc sa confiance? Ce n’était ni la réputation, ni la richesse, ni le pouvoir; c’était sa force intérieure, c’est-à-dire, ses convictions sur ce qui dépend de nous et sur ce qui n’en dépend pas. Ce sont elles seules, en effet, qui nous font libres et indépendants, qui font relever la tête à celui qu’on humilie, qui nous font regarder en face et d’un œil fixe les riches et les puissants. Voilà la part du philosophe. Mais toi, tu sortiras comme un lâche, tremblant de peur pour tes manteaux et pour ta vaisselle d’argent! Malheureux, est-ce ainsi que tu as perdu ton temps jusqu’à présent?

— « Mais si je suis malade? » — Tu seras ce que tu dois être dans la maladie. — « Mais qui me soignera? » — Dieu, et tes amis. — « Je serai durement couché. » — Comme doit l’être un homme. — « Je n’aurai pas de maison commode. » – Eh bien! tu seras malade dans une maison incommode. — « Qui me donnera les moyens de vivre? » — Ceux qui les donnent aux autres. Tu seras comme Manès dans ta maladie. — « Mais quelle sera la fin de cette maladie? » — La mort, et quoi de plus? Ne sais-tu donc pas que la source