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ni la richesse, celui qui peut, quand bon lui semble, cracher pour ainsi dire son corps tout entier à la face de quelqu’un, et s’en aller ainsi, de qui celui-là est-il esclave? De qui est-il sujet? Si, parce que Diogène vivait heureux à Athènes, il s’était laissé dominer par l’habitude d’y vivre, il se serait mis à la merci du premier venu. Quiconque était plus fort que lui aurait été le maître de lui faire de la peine. Mais te l’imagines-tu flattant les pirates, pour qu’ils le vendissent à quelque Athénien; pour qu’il pût revoir et le beau Pyrée, et la longue muraille, et l’Acropolis? Toi, que serais-tu quand tu les reverrais? Un esclave, un valet, un homme avili! Et que te servirait-il alors de les revoir? Cela ne pourrait te servir que si tu les revoyais en homme libre. Or, montre-nous comment tu les reverrais en homme libre.

Celui, en effet, qui t’enlève à ton séjour habituel, devient ton maître; et il te dit: « Tu es mon esclave, car il dépend de moi de t’empêcher de vivre comme tu veux; il dépend de moi de t’affranchir; il dépend de moi de t’abaisser. Si je le veux, tu retrouveras la joie, et, plein d’impatience, tu partiras pour Athènes. » Que répondras-tu à qui te réduit ainsi en servitude? Qui lui opposeras-tu qui ait le pouvoir de t’affranchir? Ou n’est-il pas vrai que tu n’oseras même pas le regarder en face, et que, laissant là des discussions trop longues, tu le supplieras de te laisser partir? Homme, ton devoir serait de t’en aller en prison le cœur joyeux, hâtant le pas, et devançant ceux qui t’y conduisent. Et tu craindras de vivre à Rome, par regret de la Grèce! Et, quand il te faudra mou-