Page:Les Entretiens d’Épictète recueillis par Arrien.djvu/295

Cette page n’a pas encore été corrigée

nions? Ne faisais-tu pas alors tout ce que tu faisais de la même manière qu’ aujourd’hui? Quand tu étais jeune homme, que tu allais entendre les rhéteurs, et que tu déclamais pour ton propre compte, que croyais-tu qui te manquât? Quand tu fus devenu homme, que tu t’es occupé de politique, que tu as plaidé des causes, que tu t’es fait une réputation, qui donc te semblait à ta hauteur? Quand aurais-tu souffert qu’on examinât si tu n’avais pas des opinions fausses? Que veux-tu donc que je te dise? Aide-moi toi-même dans cette affaire. Je n’ai rien à t’apprendre là-dessus; et toi, si c’est pour cela que tu es venu vers moi, tu n’y es pas venu comme vers un philosophe, mais comme tu aurais été vers un marchand de légumes ou vers un savetier. Sur quoi donc les philosophes peuvent-ils nous apprendre quelque chose? Sur les moyens de mettre et de maintenir, quoi qu’il arrive, notre faculté maîtresse en conformité avec la nature. Cela te semble-t-il une si petite affaire? — Non; c’en est une très-grosse au contraire. — Eh bien! crois-tu qu’il n’y faille que peu de temps, et que ce soit une chose qu’on puisse apprendre en passant? Si tu le peux, toi, apprends-la.

Tu diras après cela: « J’ai causé avec Epictète; autant aurait valu causer avec une pierre! avec une statue! » C’est qu’en effet tu m’auras vu, mais rien de plus; tandis que causer avec quelqu’un comme avec un homme, c’est apprendre de lui ses opinions, et lui révéler à son tour les siennes. Apprends de moi mes opinions, montre-moi les tiennes, et tu pourras dire après cela que tu as causé avec moi. Examinons-nous l’un l’autre. Si