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ordre, qu’un signe de toi? Tu veux que je parte aujourd’hui de ce grand spectacle du monde; je vais en partir. Je te rends grâce, sans réserve, de m’y avoir admis avec toi, de m’avoir donné d’y contempler tes œuvres et d’y comprendre ton gouvernement. » Que Ce soit là ce que je pense, écrive ou lise, au moment où me prendra la mort!

— « Mais, dans ma maladie, ma mère ne me tiendra pas la tête! » — Va-t’en donc près de ta mère, car tu mérites bien qu’on te tienne la tête, quand tu es malade. — « Mais chez moi j’étais couché dans un lit élégant! » — Va donc trouver ton lit; tu mérites de t’y coucher en bonne santé. Ne te prive pas de ce que tu peux te procurer là-bas.

Et que dit Socrate? « Comme un autre, dit-il, est heureux des progrès qu’il fait faire à son champ, et tel autre à son cheval, ainsi moi je suis heureux chaque jour quand je sens les progrès que je fais. » En quoi donc étaient ces progrès? Dans l’art des jolies phrases? — Tais-toi, mon cher! — Dans l’étude de la Logique? — Que dis-tu là? — Je ne vois pourtant pas autre chose dont s’occupent les philosophes. — N’est-ce donc rien à tes yeux que de n’adresser jamais de reproches à personne, ni à la divinité, ni à l’homme? Que de ne blâmer personne? Que d’avoir toujours le même visage, en sortant comme en rentrant? C’était là ce que savait faire Socrate; et jamais cependant il ne se vanta de savoir ou d’enseigner quelque chose. Si quelqu’un lui demandait l’art des jolies phrases ou la science de la Logique, il le conduisait à Protagoras ou à Hippias, comme il aurait conduit à