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les plus importants par la bouche de son meilleur messager? N’est-ce pas, en effet, ce que dit le poète?

« Car nous lui avons dit d’avance, en lui envoyant Mercure, le vigilant meurtrier d’Argus, de ne pas le tuer, et de ne pas épouser sa femme. » N’était-ce pas là ce que Mercure devait descendre lui dire? Aujourd’hui, de même, les dieux te disent, en t’envoyant Mercure, leur messager et le meurtrier d’Argus: « Ne perds pas ton temps à changer ce qui est bien; laisse l’homme être un homme, la femme être une femme, la beauté de l’homme être la beauté de l’homme, et sa laideur aussi être la laideur de l’homme. » C’est qu’en effet ta chair et tes poils ne sont pas toi; ce qui est toi, c’est ta faculté de juger et de vouloir. Fais la belle, et tu seras beau. Pour le moment, je n’ose pas te dire que tu es laid; car c’est, je crois, le mot que tu voudrais le moins entendre. Mais vois ce que dit Socrate au plus beau et au plus élégant de tous les hommes, à Alcibiade: « Tâche donc d’être beau. » Et que lui dit-il pour cela? Lui dit-il: « Arrange ta chevelure, et fais épiler tes jambes? » A Dieu ne plaise! Il lui dit: « Donne tes soins à ta faculté de juger et de vouloir. Débarrasse-toi de tes faux jugements. » Comment faut-il donc traiter le corps? Suivant sa nature. Mais c’est un autre que ce soin regarde; laisse-le lui. — Faut-il donc être sale? — A Dieu ne plaise! Mais ce que tu dois tenir propre, c’est l’être que tu es par ta nature: si tu es homme, maintiens-toi propre comme un homme; si tu es femme, comme une femme; si tu es enfant, comme un enfant. — Non, dis-tu;