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La dent d’Hercule Petitgris[1]

Nouvelle inédite
par
Maurice Leblanc


Les mains au dos, le cou engoncé dans sa jaquette, tout son âpre visage crispé par la réflexion, Jean Rouxval mesurait d’un pas rapide son vaste cabinet de ministre, au seuil duquel le chef des huissiers attendait les ordres. Un pli soucieux marquait son front. Il lui échappait des gestes saccadés qui trahissaient cette agitation extrême dont on est secoué à certaines minutes dramatiques de la vie.

S’arrêtant d’un coup, il dit avec un accent résolu.

— Un monsieur et une dame d’un certain âge se présenteront. Vous les ferez entrer dans le salon rouge. Puis il viendra un monsieur seul, plus jeune, que vous conduirez dans la grande salle. Qu’ils ne puissent ni se parler ni se voir, n’est-ce pas ? Et vous m’avertirez aussitôt.

— Bien, monsieur le Ministre.


La personnalité politique de Jean Rouxval s’appuyait sur de fortes qualités d’énergie et d’intelligence laborieuse. La guerre, qu’il avait faite dès le

  1. Copyright by Maurice Leblanc, 1924. Tous droits de traduction, adaptation, reproduction et représentation réservés pour tous pays, y compris la Russie.