jours à propos du sucrier Empire. Le premier soir, ils se sont disputés dans le salon et vu qu’il y a des portières, je n’ai rien pu entendre de ce que disait madame. Mais monsieur criait, heureusement !
— « Il est moche, ce guéridon ! J’ai des meubles de famille ; c’est suffisant.
— « …
— « Il ne manquait plus que ça ! Pas un centime pour un salon Empire !
— « …
— « Ta dot ? Elle est rue Rougemont, ta dot, dans les affaires.
— « …
— « Pas tant de joies dans la vie ?
« Comme je le disais à monsieur, je n’ai pas pu tout comprendre, mais le mot antiquité revenait souvent, même que je trouve que ce n’est pas bien poli à un homme de reprocher son âge à sa femme.
« Ce matin, madame est sortie à neuf heures et elle est rentrée à midi avec une pleine voiture de saletés : une garde-feu, une petite table, deux tasses avec trois soucoupes, un fauteuil avec trois pieds, une douzaine d’assiettes dans lesquelles on ne mangera jamais. En m’aidant à tout mettre en place, elle m’a dit :
— « Monsieur dira ce qu’il voudra ! Il ne m’empêchera pas de placer un sucrier Empire dans un cadre Empire. Et zut ! s’il n’est pas content ! J’en ai assez de vivre dans ces saloperies de meubles.
« J’aurais voulu écrire à monsieur ce que le patron a dit en rentrant, mais le mardi, je ne sers pas à table ; c’est le soir de cinéma des domestiques de l’immeuble. Je tiendrai monsieur au courant avec la discrétion que j’ai promise à mon-