Le Chemineau. — À cause de quoi ?
Ivan. — À cause que les autorités ont le pouvoir…
Le Chemineau. — Mais les autorités n’ont le pouvoir que parce que vous leur obéissez. Cessez d’obéir, et il n’y aura plus de pouvoir
Ivan. — Tu dis de drôles de choses. Les autorités… mais sans les autorités, rien n’est possible. (Il est pris d’une toux violente.) À boire… de l’eau.
Le Chemineau. — Je vais aller t’en chercher.
Ivan. — C’est pas la peine. Groucha ! Toi, va te débarrasser de ton sac dans l’izba.
Groucha. — Ah ! voilà monsieur qui vient !
Nicolas. — Pourquoi es-tu là ?
Ivan. — Dedans, il y a des mouches et il fait chaud.
Nicolas. — Tu as trop chaud maintenant ? Hier tu grelottais !
Ivan. — Aujourd’hui, je brûle comme si j’étais dans le feu
Nicolas. — Où donc est Pierre ? il n’est pas là ?
Ivan. — Vous ne voudriez pas, par un temps pareil. Il est allé dans les champs charger des gerbes.
Nicolas. — Ah ! j’aime mieux ça ! On m’avait dit qu’on allait le conduire en prison.
Ivan. — C’est vrai, le centenier a dû aller le chercher aux champs.
(À ce moment survient une paysanne dans une position intéressante ; elle porte une gerbe d’avoine et un rateau ; aussitôt elle se met à frapper Groucha sur la nuque.)
La Paysanne. — Pourquoi as-tu laissé le petit ? L’entends-tu qui crie ? Tu ne penses qu’à aller courir dans la rue.
Groucha. — Je viens de sortir. Grand-père a demandé à boire.
La Paysanne. — Je te ferai voir !… (Apercevant le maître.) Bonjour, notre maître, Nicolas Ivanovitch. Ah ! quel destin. Je me tourmente, je suis seule pour