Groucha. — Groucha !
Le Centenier. — Tu es une brave petite fille, Groucha. Mais dis-le bien a ta mère : quoique je ne sois pas un voleur, je prendrai la vache.
Groucha. — Mais pourquoi prendras-tu la vache si tu n’es pas un voleur ?
Le Centenier. — Parce qu’il faut payer ce qui est fixé… Je prendrai pour payer les impôts…
Groucha. — Qu’est-ce que c’est que les impôts ?
Le Centenier. — Quelle teigne, cette gamine ! Qu’est-ce que les impôts ? Les impôts sont fixés par le tzar pour que le peuple les paie.
Groucha. — Mais est-ce qu’il est pauvre, le tzar ? C’est nous qui sommes pauvres. Le tzar est riche. Pourquoi donc prendre chez nous ?…
Le Centenier. — Ce n’est pas pour lui qu’il prend. C’est pour nous autres, pour nos besoins, pour payer les chefs… C’est pour notre bien.
Groucha. — Quel bien ça nous fait-il que tu prennes la vache ?
Le Centenier. — Quand tu seras grande, tu comprendras… Alors dis-le à ta maman.
(Il s’éloigne en murmurant ;) La sacrée gamine !…
(À ce moment on entend les cris d’un enfant dans la chaumière. Groucha rentre. Ivan s’éveille.)
Ivan. — Oh ! que j’ai soif ! Quelle soif ! Groucha !
Groucha, reparaît sur le seuil de la chaumière. — Quoi ?
Ivan. — De l’eau… à boire !
(Groucha rentre, puis revient apportant de l’eau. On entend de nouveau les cris d’un enfant.)
Ivan. — Pourquoi frappes-tu le petit à le faire crier ? Je le dirai à ta mère.
Groucha. — Tu lui diras si tu veux. Il pleure parce qu’il a faim.
Ivan. — Tu aurais pu demander du lait aux voisins.
Groucha. — J’y suis allée, il n’y a personne chez eux. D’ailleurs ils n’en ont pas.