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hardi matelot ballotté sur tous les océans, demandez-leur: « Pourquoi tous ces labeurs ? — Nous voulons, disent-ils, abriter nos derniers jours et gagner de quoi les passer dans l'abondance et le repos ! Humble est la fourmi, mais quel grand exemple de prévoyance et de travail ! quelle ardeur à commencer sa réserve, quelle constance à l'augmenter chaque jour ! — J'en conviens; mais, sitôt que la pluie et l'hiver ont attristé la terre et le ciel, cette même fourmi se câline en son grenier et jouit doucement du fruit de ses épargnes.... Vous, cependant, votre avarice ne connaît ni repos ni trêve; l'été, l'hiver, le feu, le fer, le flot qui gronde, ne peuvent rien contre cette fureur d'accumuler. La belle avance, après tout quand vous aurez enfoui d'une main peureuse un tas d'or et d'argent inutile ! — Il est vrai, mais sitôt qu'on y touche, adieu l'or et l'argent, vous mangez jusqu'à la dernière obole. — Eh donc, si ce n’est pas pour s'en servir, à quoi bon ce trésor ? Tu battrais tous les ans, dans tes granges, cent mille boisseaux de blé, il ne te faudrait, à toi comme à moi, qu'un morceau de pain pour la journée ! Dans un troupeau d'esclaves, celui qui porte la corbeille au pain sur son épaule, aura tout juste la même part que celui qui n'a rien porté. Or çà, réponds-moi, qu'importent cent