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méthodique et systématique de mes idées, comme je l’ai soutenu partout, les services incomparables que rend la grande propriété moderne, et je prends soin de définir ce que j’entends par cette formule ; il ne s’agit pas de l’ancienne propriété féodale, de la propriété héréditaire passive, il s’agit de la propriété active et novatrice[1].

« L’avantage par excellence de la grande propriété moderne, écrivons-nous[2], c’est sa supériorité scientifique et intellectuelle ; c’est la qualité qui la rend indispensable à la bonne économie et au progrès d’une nation. Cette supériorité intellectuelle et scientifique des grands propriétaires modernes est le pivot de tous les progrès de l’agriculture. Elle l’a été dans le passé, elle l’est beaucoup plus encore dans le présent, et chaque jour son rôle s’élargira. » C’est la grande propriété moderne qui, dans le Midi, a vaincu l’oïdium, le phylloxera et le mildiew, qui a perfectionné les méthodes de vinification ; c’est elle qui, dans le Nord, a introduit et développé la betterave sucrière ; c’est elle qui, dans le Centre, a perfectionné l’élève du bétail ; c’est elle qui partout a introduit les amendements, propagé l’emploi de nouveaux engrais, guano, phosphates, nitrates ; c’est elle qui a créé la comptabilité agricole.

Qu’est-ce donc que cette grande propriété moderne ? Je me suis appliqué à définir le mot :

« Cette expression ne s’applique pas aux latifundia, domaines gigantesques de 10 000, 20 000, 50 000 hectares ou davantage. Elle a des proportions beaucoup plus modestes.

  1. Le lecteur remarquera qu’il ne s’agit ici que des services économiques de la grande propriété ; on sait qu’il y faut ajouter ses services sociaux, ceux que par sa présence, par son patronage ou par ses relations, elle rend le plus souvent à ses voisins.
  2. Traité Théorique et Pratique d’Économie politique, 2e édition, t. II, p. 7.