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forme à l’équité dans beaucoup de cas particuliers, mais cette réforme ne changera pas notre état social[1].

Les publicistes qui veulent que l’État travaille activement à amener une moindre inégalité des conditions ont vis-a-vis de lui des exigences beaucoup plus grandes que celles que nous venons de relater. Ils prétendent qu’au moyen des écoles des règlements industriels, de l’impôt et du crédit dont il jouit, il rabaisse, les riches et il exalte les pauvres.

L’instruction semble un instrument tout puissant de nivellement. On a vu plus haut qu’en effet la-vulgarisation de l’instruction avait enlevé à la classe bourgeoise un véritable monopole de fait qui avait été pour elle très productif. L’instruction générale réduit les gains et les bénéfices dans les professions libérales, dans les fonctions du gouvernement, dans les emplois des sociétés dans l’industrie et le commerce même, en multipliant les individus qui sont aptes à être de bons employés, : de bons fonctionnaires de bons commerçants. L’instruction peut encore se répandre davantage en amenant à sa suite d’une manière plus accentuée et, plus intense les effets que nous venons d’indiquer. L’école primaire est déjà gratuite dans toutes les villes et elle va l’être obligatoirement même dans les campagnes. Les bourses sont très nombreuses et elles le deviennent de plus en plus. On crée des écoles primaires supérieures, on augmente le nombre des écoles d’arts et métiers, on va instituer des lycées féminins. Rien de mieux : en rendant l’instruction moins rare, on multiplie dans la société le nombre d’hommes capables de travaux intellectuels ; mais en même temps, par une, conséquence forcée, on diminue le prix vénal de cette catégorie de travaux et de services. L’instruction dans cette mesure n’en reste pas moins un bien social, même un bien individuel, en ce sens qu’elle ouvre l’esprit à plus d’idées, à plus de jouissances, à une vie plus ample et plus variée ; mais les services intellectuels, en devenant de plus en plus offerts, si, comme il est probable,

  1. Ce qui est surtout absolument indispensable, c’est la suppression ou la modification des articles du Code qui exigent le partage des immeubles en nature et ne permettent pas la compensation par des sommes d’argent équivalentes.