Page:Leroy-Beaulieu, Essai sur la répartition des richesses, 1881.djvu/364

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

d’essayeurs ou de contrôleurs des monnaies sont aussi de bonnes sinécures qui restent à la discrétion du ministère[1]. Mais qu’est-ce qu’une demi-douzaine d’exceptions dans un pays de 38 millions d’habitants ?

On trouve encore une contrée, une seule, où les fonctions publiques sont largement rémunérées ; mais elles y sont en bien petit nombre, c’est l’Angleterre. Les traitements de 100,000, de 200,000 francs s’y rencontrent, tandis que chez nous on n’en trouve plus un seul de ce genre. Les rémunérations de trente, quarante, cinquante mille francs n’y sont pas rares. Un juge de comté reçoit 30,000 francs, et un juge d’une grande cour en obtient 125,000. Les Anglais ont voulu que leurs magistrats eussent une position à peu près aussi large que les bons avocats. En France cette considération nous laisse indifférents.

Les pensions en Angleterre sont, par rapport aux nôtres, singulièrement élevées. Un recueil curieux, et très-empreint de l’esprit démocratique, The financial Reform Almanach, contient la liste alphabétique de toutes les personnes retraitées avec l’âge qu’elles avaient en quittant le service et le montant de la pension qu’elles touchent. Nous relevons, dans ce long tableau qui contient 23 pages, en dehors de la famille royale, 4 pensions de 5,000 livres sterling ou 125,000 francs une de 4,880 livres sterling ou 114,500 francs une autre de 4,200 livres, soit 110,000 francs quatre de 4,000 liv. ster. ou 100,000 francs ; dix de 3,500 à 4,000 livres, soit de 87,500 fr. à 100,000 trois de 78,000 francs (3,000 livr. sterling) 33 pensions de 50, 000 à 75,000 fr. (2,000 à 3,000 liv. sterl.) ; 15 de 1,800 à 2,000 liv. ster. ou de 37,500 à 80,000 francs et un nombre naturellement beaucoup plus considérable de pensions de 30,000, 25,000, 20,000 francs. Que l’on pense à notre maximum de 6,000 francs

  1. En 1880 on a créé un Crédit foncier algérien dont trois administrateurs doivent être pris parmi les principaux fonctionnaires de l’administration algérienne, et dont le directeur devra être agréé (c’est-à-dire en fait nommé) par le gouverneur général de l’Algérie. Ces dispositions n’ont pour objet que de procurer des places bien rémunérées à des amis du pouvoir. C’est là une méthode singulièrement préjudiciable à la bonne conduite des affaires et à la moralité publique.