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lui appartiennent aussi. L’expression de commandite était devenue, sous la plume de Proudhon par exemple, synonyme du mot association.

Les sociétés anonymes étaient alors entourées d’entraves administratives ; il n’en existait que par privilège. Le second empire leur ouvrit la porte davantage ; puis en 1867 il les affranchit complètement, supprima toute autorisation, tout obstacle et laissa le flot se précipiter sur toutes les branches de l’activité humaine.

L’anonymat, le syndicat, voilà les deux puissances nouvelles, les deux organisations dernières, devons-nous dire définitives de l’industrie et du commerce ? Nous prenons l’expression de syndicat dans le sens qui lui est donné à la Bourse : c’est une association temporaire de sociétés ou de personnes en vue d’un objet passager quand il l’a atteint ou qu’il désespère de l’atteindre, le syndicat se dissout. Les sociétés anonymes ont singulièrement développé les grands marchés appelés Bourses dans lesquels on trafique journellement des valeurs mobilières. Aidées par les journaux et par la demi-instruction qui est généralement répandue dans les pays civilisés elles ont suscité partout le goût de la spéculation. Elles ont donné naissance aussi à un commerce tout nouveau, le plus lucratif si ce n’est le plus scrupuleux des commerces, celui de la création de sociétés anonymes, d’émission de valeurs mobilières ou de papiers enluminés portant certaines mentions et signatures. Ce genre d’entreprise est connu en Allemagne sous le nom de Grunderthum (fondation) et ceux qui l’exercent reçoivent le sobriquet de grunder (fondateur), qui répond plus exactement à notre mot français de faiseur.

La Société anonyme enveloppe maintenant de toutes parts les peuples civilisés ; c’est elle qui nous transporte en voyage, c’est elle souvent qui nous héberge, elle qui nous vend la houille, la lumière ; c’est souvent elle qui nous fait le vêtement et même qui nous le vend ; elle encore qui nous donne les nouvelles et qui inspire nos journaux ; c’est elle qui nous assure ; c’est elle qui nourrit le Parisien modeste dans les Bouillons