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faux le mot si souvent répété par la haine ou la crédulité que les riches deviennent chaque jour plus riches et les pauvres chaque jour plus pauvres.

Ce serait une recherche instructive que celle de l’influence qu’exerce la baisse du taux de l’intérêt sur le mouvement des prix. Il ne peut y avoir aucun doute que cette baisse doit avoir pour effet d’amener une certaine baisse dans les prix, toutes choses restant égales, d’ailleurs, quant à la production des métaux précieux, quant aux salaires, et quant aux arts industriels. Tous les produits manufacturés, dans le prix desquels entre l’intérêt du capital, ont une tendance à baisser, mais cette baisse est très inégale, et parfois elle peut être compensée par une hausse de la matière première, ou par une hausse du salaire. Il se pourrait que la médiocrité du taux de l’intérêt influât à la longue sur le prix des loyers, les fît baisser ou, du moins, les rendît stationnaires. En effet, plus l’intérêt est bas, plus on est porté à immobiliser le capital, à construire des maisons pour lesquelles on se contenterait d’un revenu moindre que celui qu’on eût considéré auparavant comme indispensable. Dans la période où l’intérêt est à 5 p. 100, il faut qu’une maison coûtant 500,000 francs à construire rapporte net, déduction faite de tout frais et de tout risque, 25,000 francs au capitaliste qui l’a édifiée, sans quoi il a fait une mauvaise affaire ; dans la période où le taux d’intérêt est à 3 p. 100, il suffit que cette maison produise 15,000 francs pour que la construction en ait été rémunératrice. La baisse du taux de l’intérêt devrait donc faire baisser les loyers, et il n’y a aucun doute qu’elle n’amenât ce résultat, si d’autres causes n’agissaient en sens contraire. Il se peut, en effet, que la baisse du taux de l’intérêt soit compensée en partie par la hausse du prix des terrains, si toutefois le privilège de situation des terrains du centre n’a pas été diminué par le perfectionnement des voies de communications urbaines et surburbaines, comme on l’a démontré dans un précédent chapitre. Il se peut surtout que l’influence de la baisse du taux de l’intérêt relativement au taux des loyers soit neutralisée par les exigences des ouvriers et par la hausse