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L’exemple de Calvin est isolé parmi les fondateurs d’églises. Une telle sagacité pratique est rare chez les esprits uniquement occupés des intérêts célestes et du perfectionnement moral de l’homme. Ce qui a donc prévalu dans l’histoire, ce sont les défenses ecclésiastiques contre le taux de l’intérêt prohibitions vaines comme toutes celles qui s’attaquent à la nature des choses. Ceux mêmes qui les voulaient respecter trouvaient facilement des expédients, des biais pour échapper à ce qu’elles avaient d’injuste et de rigoureux. On ne violait pas la loi ecclésiastique, mais on la tournait de la manière la plus ingénieuse et la plus sûre. Le célèbre économiste allemand Roscher a décrit les procédés qui étaient suivis à cet effet au moyen âge. Le plus habituel était connu en Allemagne sous le nom de schätzung, qui nous paraît à peu près intraduisible, c’était une sorte de vente à réméré. Le prêteur entrait en jouissance des immeubles de l’emprunteur et il en touchait les fruits, ce qui lui procurait un intérêt de son argent. C’était là l’hypothèque, mais une hypothèque aggravée puisque l’emprunteur perdait la disposition et l’administration de son bien, et qu’il était fort à craindre qu’en beaucoup de cas le prêteur, ainsi nanti de son gage, ne consacrât que des soins médiocres à l’entretenir si la valeur de ce gage dépassait de beaucoup celle de son prêt. Tel est l’habituel résultat de toutes les dispositions artificielles qui veulent protéger l’un des contractants, réputé à priori plus faible que l’autre ; elles aggravent sa situation. L’Église en vint aussi dans quelques cas à vouloir prendre des précautions contre cet expédient de la vente à réméré ou schätzung.

Il est intéressant et instructif de suivre dans l’histoire des

    l’Église « en vertu du droit naturel, divin et ecclésiastique », devient permise. Bien plus, le prêteur pourra stipuler les intérêts des intérêts ; bien plus, il pourra dépasser l’exigence du taux légal si son débiteur n’est pas dans une grande détresse ; enfin, qu’il ne s’inquiète de rien, s’il est banquier, car il pourra exiger de tout le monde quelque chose en plus pour rémunération de sa peine.
    « Voilà, si je ne me trompe, une situation bien simplifiée : mais qu’en dirait Benoît XIV, et que devient sa bulle Vix pervenit contre le prêt à intérêt ?
    Nous dirons à notre tour : Qu’est-ce que M. Paul Bert peut trouver à reprendre dans ces très exactes définitions des sources et de la nature de l’intérêt ?