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L’État et les villes ont bien fait des prêts de ce genre pour aider certaines industries à traverser des crises, pour le drainage, pour les irrigations, etc. En dehors des prêts directs, faits au taux habituel de leur crédit, l’État et les villes pourraient atteindre par un autre moyen le même but ce serait de n’accorder le privilège des lots qu’aux emprunts émis par les sociétés philanthropiques et absolument désintéressées qui construiraient des maisons destinées à l’habitation des ouvriers. On sait qu’un emprunt à lots, y compris l’intérêt, les lots et l’amortissement, peut ne revenir qu’à 3 1/2 p. 0/0 d’annuité. Les lots sont une faveur que l’État a octroyée sans discernement ou par complaisance à des sociétés de spéculation. Il serait moral de réserver ce privilège aux sociétés qui s’interdisent absolument toute distribution de dividende au delà d’un très mince intérêt, et qui se consacrent à une œuvre d’utilité sociale.

L’État et les villes n’ont pas le devoir de faire des sacrifices pour rendre plus égales les conditions humaines ; ils n’en ont même pas le droit. Mais rien ne leur interdit, par des prêts ou par d’autres mesures qui ne coûtent rien au contribuable, de venir en aide à l’amélioration du sort des classes laborieuses.

L’État a encore un autre rôle. Il n’est pas seulement le gardien de la sécurité et de la liberté des transactions ; il l’est aussi de la moralité et de l’hygiène. À ce point de vue il ne saurait être trop attentif à la situation des « garnis » où s’entasse la population nomade. Une ordonnance de 1832 a placé ces logements sous la surveillance de la police mais on ne se préoccupait alors que de procurer une plus grande sécurité à la capitale, les hôtes des garnis étant naturellement suspects. En 1850 on se dégagea de ce matérialisme, et on résolut de s’occuper des petits logements non seulement pour assurer le repos de l’ensemble de la métropole, mais pour soustraire à des conditions pernicieuses d’existence les habitants de tous ces appartements de la dernière classe. On rendit la loi relative à l’assainissement des logements insalubres. Ce fut là une extension de l’action de l’État sans qu’il sortit de ses attributions naturelles. La Commission pour l’assainissement des logements insalubres