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quart à Paris. Nous acceptons pour Vienne et Berlin les renseignements du statisticien allemand ; pour Paris la proportion qu’il donne est certainement trop élevée. En tenant compte de toutes les classes de la population, le loyer nous paraît prélever en moyenne à Paris le sixième ou le septième du revenu, ou du moins de la dépense, ce qui n’est pas la même chose que le revenu.

Les écarts qu’offre la proportion du loyer avec le revenu dans les principales villes tiennent aux degrés inégaux de sociabilité des peuples, de rapidité de croissance des villes, de facilité des communications urbaines et suburbaines, à l’inégalité des impôts qui renchérissent directement ou indirectement les constructions.

L’importance relative du loyer dans le budget d’une famille n’est, d’ailleurs, pas toujours un mal. Plus un peuple est civilisé, instruit, délicat, plus le loyer tient de place dans les dépenses des individus qui forment ce peuple. Les rapports des consuls anglais sur la situation des classes ouvrières à l’étranger donnent d’instructifs renseignements sur la proportion de la dépense du loyer aux salaires. Elle n’est nulle part plus forte qu’aux États-Unis d’Amérique, et c’est un bien. Les villes américaines ont pour la plupart une énorme étendue qui forme un contraste avec l’étroitesse des grandes cités françaises et particulièrement de Paris. De même que Londres, suivant l’heureuse expression de M. Guizot, est une province couverte de maisons, ainsi Buffalo, la Nouvelle-Orléans, Philadelphie et bien d’autres s’étendent sur une superficie considérable le terrain, tout en y étant aussi cher, parfois plus qu’à Paris, dans les quartiers du centre consacrés aux affaires, y est à bien meilleur marché dès que l’on s’éloigne un peu de ces districts privilégiés. La plupart des ouvriers habiles y possèdent de petites maisons, comprenant deux ou trois chambres, une salle, une cuisine et entourées d’un jardin cela leur coûte 7 ou 800 francs, parfois un millier de francs par an, le quart ou le cinquième de leur rémunération annuelle. Mais ils sont ainsi chez eux, logés comme de petits bourgeois, avec des tapis, des fauteuils, des gravures, un piano parfois. La décence du loyer