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Trois défauts, en effet, nous frappent dans la charité du christianisme : 1-le moi, ou la liberté humaine, abandonnée ; l’égoïsme nécessaire et saint dédaigné, foulé aux pieds ; la nature méprisée, violée. 2-le moi, ou la liberté humaine, tournée directement vers Dieu ; l’être fini aspirant directement à n’aimer que l’être infini. 3-le non-moi, ou le semblable, dédaigné dans la charité même ; aimé en apparence seulement, et par une sorte de fiction, en vue de Dieu, unique amour du chrétien. Le chrétien fervent, tourné uniquement vers Dieu, n’aimait réellement ni lui-même ni les autres, et se trompait en croyant aimer Dieu comme Dieu veut être aimé. C’est en effet au pur amour de Dieu et au renoncement de toutes les créatures que sont venus aboutir tous les docteurs un peu profonds du christianisme. Tandis que la charité prenait pour le vulgaire un air d’humanité, tandis que le vulgaire cherchait là une règle pratique de conduite et de vie, les vrais penseurs du christianisme comprenaient bien que la charité du christianisme n’avait réellement que Dieu pour objet, et que cette charité, entendue par le vulgaire comme l’amour des hommes, n’était réellement qu’un amour abstrait pour Dieu.