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nos idées, tous nos sentiments, tous nos actes, seront ou pourront être gouvernés despotiquement par le souverain, c’est-à-dire par la majorité ! Oui, dit encore Rousseau, il n’y a pas d’autre moyen pour nous d’être libres ; car les hommes sont chacun une force, une volonté, une liberté, un moi indépendant ; et je vous défie d’harmoniser ces moi homogènes, sinon par une convention de ce genre. De même que Platon était arrivé au despotisme par la connaissance, de même que Hobbes et Machiavel étaient arrivés au despotisme par la sensation, Rousseau arrive donc au despotisme par le sentiment. et en effet, en ne considérant l’homme psychologiquement que comme une volonté (sentiment), ou en ne le considérant que comme une passivité (sensation), ou en ne le considérant que comme une intelligence (connaissance), c’est-à-dire en sacrifiant deux aspects de sa nature au troisième, on a, non pas des êtres semblables, mais des êtres homogènes, que rien ne relie, et entre lesquels il n’y a pas d’autre mesure commune que l’abstraction que l’on a conservée, soit connaissance, soit sentiment, soit sensation. Donc, ou vous subordonnerez ces êtres les uns aux autres sous le rapport admis par vous, et ainsi vous aurez du premier coup le despotisme. ou vous les égaliserez tous, quelque inégalité naturelle qu’il y ait entre eux, même sous