Page:Lermontov - Un héros de notre temps, Stock, 1904.djvu/237

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

et profond, et a secoué la tête ; ses lèvres voulaient dire quelque chose et ne le pouvaient pas ; ses yeux se sont remplis de larmes ; elle s’est affaissée sur son fauteuil et s’est caché le visage dans ses mains.

« Qu’avez-vous ? lui ai-je dit, en lui prenant la main.

— Vous n’avez pas d’estime pour moi ! oh ! laissez-moi ! »

J’ai fait quelques pas ; elle s’est redressée sur son fauteuil ; ses yeux étincelaient. Je me suis arrêté en m’appuyant d’une main à la porte et lui ai dit :

« Pardonnez-moi, princesse, je viens de me conduire comme un fou ; cela ne m’arrivera plus ; je serai plus prudent, — mais pourquoi vous faire connaître ce qui se passe dans mon âme ? Vous ne le saurez jamais, et tant mieux pour vous. Adieu !… »

En m’en allant, il m’a semblé que je l’entendais pleurer.

J’ai rôdé à pied jusqu’au soir dans les environs du Machuk ; j’étais horriblement fatigué et en rentrant chez moi je me suis jeté sur mon lit, complètement harassé.