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L’ONCLE BARBE-BLEUE

Il fallut expliquer à M. Maranday les projets charitables de ces demoiselles. Comme quoi, on avait cousu de nombreux vêtements pour les petits indigents. Et le désir de Valentine de procurer « une journée de bonheur à tous les petits pauvres des environs. »

M. Maranday écoutait, impassible en apparence seulement. Luis était vivement intéressé. Il rit de bon cœur quand Geneviève raconta la désillusion qu’elle avait eue en ne trouvant dans le village personne à qui allassent les vêtements qui avaient coûté tant de travail.

— Voilà ce que c’est que de n’avoir pas écouté Mlle Favières, s’écria-t-elle d’un ton comique.

Marie-Antoinette, interrogée sur ce qu’était devenu le billet qu’elle avait reçu, répondit :

— Je le dois à ma couturière.

— Déjà des dettes de couturière ! s’écria son oncle. Tu commences de bonne heure. Je ne voudrais pas être ton mari plus tard.

On rit. Mais Valentine semblait embarrassée. Elle essaya à deux reprises de détourner la conversation. Il lui fallut pourtant répondre comme les autres, à un interrogatoire direct.

Alors, toute rougissante :

— Mon oncle, permettez-moi de ne pas vous dire ce que j’ai fait de mon billet.

M. Maranday n’insista pas, mais il pensa à part lui :

« Se pourrait-il que ma petite Valentine soit avare, et qu’elle ait honte de l’avouer. »

Luis connaissait mieux sa petite amie :

« Vous avez tout envoyé là-bas ? » lui dit-il à l’oreille.