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L’ONCLE BARBE-BLEUE

— Nos parents ont été bien imprudents de nous laisser venir seules, ajouta sa sœur d’un petit air entendu.

— Je t’engage à parler, toi ! s’écria Geneviève. Tu n’as pas même le courage d’avouer tes fautes. Est-ce la présence de ta maman qui t’aurait empêchée de mentir comme tu l’as fait tout à l’heure ?

— C’est ta faute aussi ! tu n’aurais pas dû nous entraîner au grenier !…

— Allez-vous pas vous disputer, maintenant ? dit Marie-Antoinette, qui ne songeait qu’aux dangers que pouvait courir sa précieuse petite personne ; le moment est bien choisi, vraiment ! Pour moi, je vous avertis que je ne passerai pas la nuit ici. J’aurais trop peur d’être tuée pendant mon sommeil.

— Comme les enfants d’Édouard ? murmura Geneviève en haussant les épaules. Tu n’as qu’à fermer ta porte à clef, si tu as si peur que cela.

— On entrerait peut-être par le balcon. Non, vous dis-je, je ne coucherai pas dans ce château où se passent des choses si extraordinaires.

– Ni moi non plus, s’écria Charlotte, quelque peu troublée par les reproches de sa conscience.

– Je ne demanderais pas mieux que d’en faire autant, dit sa sœur, très pratique, mais comment voulez-vous que nous nous en allions sans être vues ? On nous rattraperait bien vite et ce serait pire qu’auparavant.

– Le courrier passe à six heures, suggéra Marie-Antoinette, que la peur rendait ingénieuse.

— Au fait, c’est une idée. Prenons sa voiture.

— C’est parfait, s’exclama Charlotte. Faisons un paquet des affaires auxquelles nous tenons le plus, et sortons, comme