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L’ONCLE BARBE-BLEUE

mêle sur un coin de l’établi de menuiserie ; tous livres de voyages et d’aventures extraordinaires : Mayne-Reid, Jules Verne, etc.

— Cela m’amuserait beaucoup de connaître l’enfant à qui tous ces jouets ont appartenu, dit-elle, je me le représente plein de fougue, ne rêvant que Robinsons, naufrages et guerres. Qui sait où il est maintenant et ce qu’il fait.

— Il est peut-être assez vieux pour être ton grand-père, dit Geneviève, toujours montée sur son cheval.

— Oh ! non, car j’ai trouvé parmi ces bouquins un volume qu’on a donné l’an passé à mon frère, pour ses étrennes.

— Et il n’y a pas si longtemps que l’on fait des bicyclettes, ajouta Charlotte.

— Alors, il est peut-être mort !… lança au hasard Geneviève.

Un frisson agita les trois fillettes à cette seule pensée. L’idée de la mort impressionne toujours les enfants. Mais cachant sa peur par pure fanfaronnade :

— S’il était encore ici et qu’il puisse nous voir nous emparer de ses affaires, il serait furieux ! s’écria Geneviève en sautant à bas de sa monture. Maintenant, son cheval est à moi par droit de conquête, comme dit papa, et je ne le lui rendrai pas.

— Pas plus que je ne lui rendrai cet uniforme qui me va si bien, ajouta Charlotte.

— Valentine, déjà plongée dans Les Aventures du célèbre Pépé, ne les entendit même pas.

Ces paroles étaient à peine sorties de leur bouche qu’une lourde main s’abattait sur l’épaule de Geneviève et de Char-