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AU GRENIER

Et, de dépit, elle lança sa brochure au plafond :

« Ne trouverons-nous donc jamais d’auteurs qui nous connaissent réellement et nous peignent comme nous sommes, au lieu de faire de nous des marionnettes de chez Guignol ou de mauvaises copies des grandes personnes ! ajouta Geneviève.

— Écris-en une toi-même, alors, de comédie, s’écria Marie-Antoinette dans un français rien moins qu’élégant.

— Si j’osais !… murmura Valentine.

— La critique est aisée, mais l’art…

— Est Hippolyte, interrompit Geneviève, terminant à sa façon cet axiome célèbre.

— Comprends pas, dit Marie-Antoinette, dédaigneuse.

— Dame, si la critique est Thésée, l’art peut bien être Hippolyte.

Celles qui saisirent la plaisanterie, éclatèrent de rire. Marie-Antoinette fit la moue.

— Je ne vois pas pourquoi nous n’en arriverions pas à écrire nous-mêmes une petite comédie, reprit Valentine.

Aussitôt, des quolibets l’assaillirent de toutes parts.

— Montre-nous donc la couleur de tes bas.

— Nous ignorions que nous avions l’heur de compter parmi nous un auteur dramatique.

— Une George Sand en herbe,

— Ou plutôt un poète élégiaque, car avec ses airs de saule pleureur, Valentine ne peut écrire que des lamentations imitées de Jérémie.

Valentine faillit perdre patience :

— C’est bon ! n’en parlons plus ! D’ailleurs je n’ai jamais prétendu la faire seule, cette comédie.

— Mais enfin, s’écria Geneviève, qui était restée silencieuse