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Ils arrêtèrent, pour dîner, à une petite auberge de village où on leur servit une assiettée d’excellente soupe et une fricassée de mouton dont Délima, qui commençait à reprendre ses esprits, se régala de bon appétit. Après cela ils se remirent en route ; mais la grande quantité de neige qui était tombée avait rempli les chemins, et leur vigoureux cheval canadien, dont les jarrets paraissaient de fer, se démenait violemment dans les brouillards de poudrerie, secouant de temps en temps les petits glaçons qui s’étaient attachés à ses yeux et à sa crinière. Nos voyageurs commençaient à regarder avidement dans le lointain pour tâcher d’apercevoir le petit village et l’auberge où ils devaient passer la nuit. Le vent était froid et perçant, mais Armand protégeait sa femme de la bise piquante en l’enveloppant dans les nombreuses robes dont la carriole était garnie. Enfin on commença à apercevoir quelques lumières à travers l’atmosphère chargée de neige, et ce fut avec un sentiment d’excessive satisfaction qu’ils arrivèrent à l’auberge si désirée.

Ils y avaient été précédés par d’autres voyageurs, car on entendait le son de voix à travers la porte entre baillée du petit salon, un bruit grésillant et une odeur appétissante venaient du poële, et une couple de cultivateurs étaient à jaser, fumer et boire dans le bas-côté.

Délima qui était d’une humeur pitoyable s’assit sur la première chaise venue, mais