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d’un pauvre célibataire. Tout était dans le même état qu’au commencement des hostilités, les meubles en désordre, le tapis couvert de miettes de pain, de bouts de fil, de papier, et par la porte qui en était restée à demi ouverte on pouvait voir dans la cuisine une table remplie d’assiettes sales, un foyer tout couvert de cendres et un plancher sur lequel le balai n’avait laissé aucune trace de son passage.

Le choc que ce spectacle infligea à la tante Françoise, qui aimait tant l’ordre et la propreté, ne peut se raconter. Mortifié et confondu, Armand balbutia quelque chose sur ce que Délima avait été obligée de sortir avec sa cousine, madame Martel, et que leur servante était partie brusquement, — c’était la première fois que madame Ratelle apprenait qu’ils avaient une domestique à leur service ; — puis il pria sa tante de s’asseoir pendant qu’il ferait du feu, la seule partie de l’économie domestique dont il eût une idée un peu claire.

Elle y consentit en silence, et pendant que son regard se promenait de la taille svelte de son neveu sur laquelle le feu naissant commençait à jeter ses reflets, à l’affreuse confusion qui l’environnait, ses pensées se reportaient aux premières années du mariage de son frère et à ses propres réclamations contre le choix qu’il avait fait. En ce qui concernait le confort domestique et la conduite du ménage, il y avait une similitude étrange entre le sort du père et celui du fils ;