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— Non, je ne demande pas trop : qu’est-ce que te diraient ces pauvres lèvres glacées si elles pouvaient parler ? Armand, tu aimais ton père très-tendrement, et malgré le petit refroidissement qui a existé entre vous dans ces derniers temps, tu étais son fils favori.

— C’est parce que j’aimais mon père que je veux me venger de celui qui, par une série de complots infâmes et une trahison inique, m’a fait perdre son affection.

— Mais, à qui ton père s’est-il attaché à ses derniers moments ? Armand, Armand, n’endurcis pas ton cœur contre mes prières et contre les supplications muettes de ces lèvres refroidies, de ce cœur qui ne bat plus et qui ne peuvent te faire appel que par leur immobilité. De même que je t’adresse ma prière, Armand, de même il t’aurait conjuré, il t’aurait imploré d’abandonner une vengeance qui fera peut-être de toi un Caïn !

Le jeune Durand était singulièrement perplexe : il baissa la tête, puis il murmura :

— Eh ! bien, je le promets !

— Le ciel te bénira pour ce mot, mon Armand ! Je sais que tu regarderas comme aussi sacrée qu’un serment une promesse faite dans nue présence aussi solennelle… Ah ! voici Paul qui monte… Dieu merci ! je n’ai plus besoin de craindre son arrivée comme il y a une demi-heure. Mon Armand, sois fidèle à ta parole.

La porte s’ouvrit et donna passage à Paul. Celui-ci recula involontairement en apercevant son frère ; puis il avança d’un pas ou deux, et lui dit d’un air embarrassé :