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parmi les convives, à en juger par leurs longs éclats de rire, leurs couplets de chansons, leurs acclamations, et de temps en temps par le bruit de grosses bottes qui exécutaient sur le plancher un pas de danse.

Lorsqu’Armand entra il y eut une suspension momentanée à ce brouhaha, et il en profita pour s’excuser sur son retard. L’hôte lui expliqua que pour empêcher ses invités de dévorer les huîtres avant l’arrivée de M. Durand, il les avait mis au défi de prendre du plaisir sans l’aide de rafraîchissements, solides ou liquides. D’après le résultat qu’il en avait obtenu, le lecteur peut concevoir quel degré aurait atteint la gaieté si elle eût été stimulée par le souper que Lespérance, avec l’aide d’un de ses amis, était actuellement à leur préparer.

L’appartement dans lequel Armand se trouvait différait beaucoup du sien si propre et si bien tenu : il était petit et bas, le plafond et les boiseries ternis par le temps et la fumée. Il ne portait aucune trace d’ornements ; seulement on remarquait quelques images aux peintures grossières de danseuses aux joues rouges, aux jupes courtes et amples, à côté du portrait d’un boxeur en renom et de celui d’un fameux bouffon français. Dans un coin il y avait un grand coffre peinturé, contenant la garde-robe du maître de céans et servant en même temps de bibliothèque, car on y voyait une pile de livres tout poudreux et à l’air vénérable ; dans un autre coin on apercevait un manche de ligne