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avait à lui parler confidentiellement. Dès qu’ils furent seuls, elle lui demanda, moitié fâchée, moitié sérieuse : « quelle impression il voulait donner à son visiteur de l’urbanité canadienne ? »

— La même que celle qu’il m’a donnée de la politesse britannique, répondit-il froidement. Mais, dites-moi, Lucille, au nom du ciel, est-ce que ce fat élégant est le prétendant d’Antoinette ?

— Il est certainement un de ses fervents admirateurs ; je crois même qu’il est quelque peu favorisé. Mais, Louis, vous ne devez pas en parler aussi légèrement, ni le traiter avec autant de dédain : le major Sternfield est un homme qui possède de rares avantages, et…

— Tenez, Lucille, cela suffit, dit-il en l’interrompant et en se débarrassant de la légère étreinte où elle le tenait. Grand bien lui fasse, la pauvre enfant ! car elle s’apercevra ayant peu que ce qu’elle prend pour de l’or pur n’est que du cuivre… Non, je ne puis rester aujourd’hui : n’insistez pas davantage, faites mes adieux à Antoinette. Au revoir.

Et se dégageant encore une fois de la main qui cherchait à le retenir, il s’élança au dehors.

Madame d’Aulnay resta un moment pensive.

— Certainement, se dit-elle, voilà un prétendant désappointé !

Puis elle revint au salon en songeant quel sacrifice ce serait que de donner à Antoinette un mari comme Louis Beauchesne.