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Le danger était imminent, car le chemin longeait de près le bord des rapides, et en quelques endroits il s’élevait de plusieurs pieds au-dessus des flots grondants. Cependant la main qui tenait les rênes était une main de fer ; sa poignée ferme et vigoureuse modérait les allures désordonnées des chevaux épouvantés. Au premier moment, Evelyn s’était retourné vers sa jolie compagne pour prévenir par quelques paroles d’encouragement les cris perçants, les défaillances ou les autres faiblesses de femme qui auraient considérablement augmenté le danger de la situation ; mais Antoinette e tenait parfaitement calme et tranquille, ses lèvres légèrement comprimés ne trahissaient autrement que la par la pâleur de marbre dont elles étaient recouvertes sa secrète terreur.

Remarquant le regard rapide et plein d’anxiété qu’Evelyn avait jeté sur elle :

— Ne vous occupez pas de moi, faites attention aux chevaux ! dit-elle.

— Quelle courageuse enfant ! se dit le colonel en lui-même.

Et rassuré sur son compte, il employa tous ses efforts et toute son habilité à reprendre son contrôle sur les coursiers.

Un œil pénétrant et une main puissante étaient en ce moment d’égale nécessité, car ils approchaient d’un endroit où la rive devenait plus escarpée et le chemin plus étroit. Malheureusement, une charrette