Page:Leprohon - Antoinette de Mirecourt ou Mariage secret et chagrins cachés, 1881.djvu/300

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

douleur déguisée, ses yeux se promenaient avec inquiétude autour d’elle, comme si elle eut été embarrassée et eut cherché du secours, ce qui témoignait plus de crainte que d’amour ; et, quoique Sternfield fût assez près d’elle que leurs chevelures se touchaient presque et que ses yeux eussent un éclat capable de donner de l’émotion à une personne qui aurait eu le moindre amour pour lui, la froideur d’Antoinette ne cessait pas et la rougeur qu’elle avait perdue à son arrivée ne revint pas.

Cependant, Audley avait réalisé ses plans : il avait changé en un état d’embarras l’aimable cordialité qui régnait dans le salon lorsqu’il y était entré, et, tout en infligeant un fâcheux contretemps à celui qu’il supposait être son rival, il avait du même coup puni Antoinette d’avoir eu de la gaieté et de s’être amusée pendant son absence.

Madame d’Aulnay, néanmoins, avait hâte de trouver une bonne occasion d’exercer des représailles. Cette occasion se présenta, bientôt.

— Je reviendrai demain, mademoiselle de Mirecourt, si vous me faites l’honneur de monter en voiture avec moi, — venait de dire Sternfield.

— C’est impossible, se hâta d’interrompre Lucille. Antoinette et moi avons promis d’aller à la campagne avec M. Beauchesne, pour y voir un commun ami.

Sternfield se retourna vers sa femme, mais les regards de celle-ci, qui étaient fixement attachés au