Page:Leprohon - Antoinette de Mirecourt ou Mariage secret et chagrins cachés, 1881.djvu/298

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

à ses pieds sur un de ces petits tabourets dont les chambres de madame d’Aulnay étaient remplies et que les ennemis de Lucille prétendaient être destinés à cet usage. La chaleur du poêle avait communiqué des couleurs aux joues de la jeune fille ; et comme Louis, probablement fatigué, remuait beaucoup et rendait ainsi la besogne plus difficile, elle s’était mise à le gronder et à le plaisanter sur sa maladresse. Tout-à-coup la porte s’ouvrit, et, sans se faire annoncer, Sternfield entra. Il s’arrêta un instant sur le seuil et plongea un regard sombre sur le groupe. Il était venu ce soir-là, pensant magnanimement qu’il avait assez puni Antoinette de l’obstination avec laquelle elle avait refusé son tour de voiture, et croyant la trouver malade, pâle et abattue ; il la voyait, au contraire, avec de vives couleurs sur les joues et des sourires sur les lèvres comme on ne lui en avait pas vus depuis longtemps, tandis que Louis était assis à ses pieds, son gai et joli visage tourné vers celui de la jeune femme.

Madame d’Aulnay, qui avait facilement deviné les sentiments de jalouse colère du nouveau venu, se divertit franchement dans le triomphe du moment, et, avec un semblant de badinage qu’il trouva déplacé, elle lui demanda où il était allé dernièrement et ce qu’il avait fait de lui-même.

Il répondit à peine, s’avança vers une chaise qui se trouvait près d’Antoinette, et, après s’y être jeté, exprima ironiquement le plaisir qu’il avait de voir l’état