Page:Leprohon - Antoinette de Mirecourt ou Mariage secret et chagrins cachés, 1881.djvu/291

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

— De pareilles nouvelles sont toujours exagérées, répondit-elle en essayant vainement de paraître indifférente.

— Cependant, vous n’avez pas l’apparence d’une personne en bonne santé : est-ce l’esprit ou le corps qui est malade, mademoiselle de Mirecourt ?

Et il examina d’un œil scrutateur les traits de la jeune fille. Se penchant vers elle, il poursuivit à voix basse :

— Vous m’avez dit, une fois, que vous étiez très-malheureuse, et j’avais à peine ajouté foi à vos paroles ; aujourd’hui, je lis sur votre figure que vous disiez la vérité. Eh ! bien, pour expier mon incrédulité, et en considération de l’immense affection que j’ai eue pour vous, je désire vous donner un conseil : peut-il être utile de vous avertir de ne placer aucune confiance en Audley Sternfield ? Il est indigne de l’amour d’une honnête femme.

— Trop tard !… trop tard !… le passé est irrévocable.

— Oui, après ce que j’ai vu, j’aurais dû savoir qu’il en était ainsi. Eh ! bien, mademoiselle de Mirecourt, permettez-moi de vous dire que vous avez choisi un appui bien fragile ; mais les regrets sont superflus : adieu !

Touchant le bord de son chapeau, il s’éloigna au moment même où madame d’Aulnay, qui avait terminé ses achats, sortait du magasin, après avoir fatigué le propriétaire et le commis pour une nuance lilas à la recherche de laquelle tout l’établissement avait été mis sans-dessus-dessous.